Claire est revenu de Dijon. On est allé boire notre café habituel dans notre bar habituel, avec notre serveur habituel. Et puis appel de Ben, un ami à Amaury. Celui qui a eu la petite fille qui est née le même jour que mon Ange. Celui qui a choisit mon Ange comme parrain. J'ai laissé Claire aller choisir ses lunettes. Et je suis allée chez Ben.

Livide. Quand je dis Livide, je ne résume pas tout. Transparent. Voilà comment étais mon Ange. Première question habituelle " Tu as pris quoi?" [ ... ] Réflexe. " Rien. J'ai appris pleins de trucs et j'suis très fatigué". L'aprem sera mauvaise. Il me raconte sa nuit, sa matinée. La merde. Je n'aime pas ces moments. "Allez viens on va sur le boulevard prendre le soleil". Il me sourit mais c'est sans convictions.

Le boulevard. Tous les soirs, les jeunes se retrouvent ici. Mon lycée est juste en dessous. C'est une grande allée avec des chênes, des bancs, le soleil, la fontaine au bout, seul paradis pour nos squatters. On passe devant le lycée "On t'aura" murmure-t-il. Comme un appel à l'aide. Puis nous marchons. Il a moins froid avec le soleil. Il n'a rien dans les poches donc nous marchons tranquillement, en parlant de tout et de rien. Je lui dis que j'écris beaucoup, que j'aimerais être toujours un enfant. Il m'explique que quand je vais en boîte, il sait ce que pensent les hommes de moi, qu'ils ne veulent pas qu'ils pensent cela. Moi, je vais en boîte pour danser, parce que c'est le seul endroit où on peut danser sans que quelqu'un nous observe drôlement ou professionnellement. Il me comprend. Il me rassure. "Tu auras le droit de danser dans notre salon". Je ris. On refait le boulevard de l'autre sens. Le soleil lui donne des forces. Je sautille. Je ne tiens plus en place. "Dimanche, je te présente à ma mère".  Je m'arrête. "Vrai?""Bien sûr Tit Bout". Mon sourire est aussi grand que le soleil. J'ai hâte de connaître sa mère.

Retour en ville. Je dois passer au Pierre Qui Mousse, pour vérifier si Claire a bien eu mon message et qu'elle est bien avec Bastien. Oui. C'est bon. Retour chez mon homme. Il est avachie sur son lit. Il respire mal. Il est blanc. Je le mets sous sa couette. Câlins. Mais je sens son corps se tendre et se détendre. Le coeur bat vite. Il a froid alors que moi je suis en débardeur. "Tu as le cerveau qui a tourné trop vite, mon Ange." Il ne répond pas. "Amaury? AMAURY!!!! " Il est dans les pommes. Une claque. " Je te vois mal Petit bout, ne me quitte pas.""Putain arrêtes tes conneries". Il pense. "Dors ce soir, fais moi plaisir". Je le laisse seul, je ne peux rien faire, je dois retourner chez moi sinon je ne pourrais plus sortir.

Le retour fut difficile. Un petit bout avec Claire. Puis la descente. Seule. Les camions passent vite. Le ciel est bleu, avec des reflets roses. Il fera beau demain. Ce soir, sortir, je devrais. Seulement je ne sais pas si je peux. Moralement. Je pense. Vite. Très vite...

Amaury m'a demandé si je pensais que notre cerveau était dirigé par une chose plus puissante que nous. Une genre de Matrice. Ca ma fait encore plus réfléchir.

Mon Ange, est ce que je peux dormir? ...